dimanche 28 octobre 2007

Strategic Air Command - Années quatre-vingt et fin du SAC


Avec l'arrivée au pouvoir de Ronald Reagan, en février 1981, la situation évolua considérablement et la guerre froide se renforça.

Les programmes du bombardier B-1 Lancer et du missile MX (LGM-118A Peacekeeper) reprirent vie, et les investissements dans le domaine de la défense connurent une extraordinaire augmentation.

Reagan encouragea également le projet du B-2 Spirit, essentiellement parce qu'il fallait trouver un remplaçant au Boeing B-52, bientôt en passe d'être retiré du service. Mais celui-ci n'entrera en service qu'en avril 1997, cinq ans après la disparition du SAC.

De nombreux B-52G et B-52H avaient pourtant été transformés en plate-formes d'emport de missiles de croisière: 98 des B-52G étaient armés d'ALCM AGM-86B, tandis que les 102 B-52H produits avaient été conçus dès l'origine pour recevoir des armes de ce type.

Le premier des 100 ICBM LGM-118A Peacekeeper commandés par l'US Air Force fut mis en place dans un silo de Minuteman dans le courant de l'année 1986.

Deux ans plus tard, pour la première fois depuis la fin de l'engagement américain au Vietnam, c'est-à-dire 1973, le Strategic Air Command affecta quatre Wings de B-52 à des missions conventionnelles, en l'occurence l'attaque antinavire.

A la fin des années quatre-vingt, la situation internationale changea de manière considérable et on assista à un revirement complet. C'était la fin de la Guerre froide.

En mai 1988, deux ans après que ses entretiens avec le Premier Secrétaire du Parti communiste soviétique, Mikhaïl Gorbatchev, eurent échoué sur le projet de la "Guerre des Etoiles", Reagan effectua une visite en Union Soviétique.

La même année, George Bush Sr, ayant remporté les élections présidentielles, poursuivit la politique de rapprochement avec les Soviétiques entamée à la fin du second mandat de son prédécesseur.

La flotte de bombardiers stratégiques était alors devenue trop réduite par rapport aux besoins. Officiellement, les 346 avions en service au début de 1990, 157 B-52G, 93 B-52H et 95 B-1B, étaient encore jugés suffisants, mais les militaires américains ne raisonnaient plus de la même manière.

La force de missiles ballistiques ICBM déclinait également. Les Titan II devaient être ferraillés conformément aux accords de désarmement START, pour "Strategic Arms Reduction Talks", signés avec l'URSS. Parrallèlement, les Minuteman I et II étaient en train de disparaître de l'inventaire du SAC, alors que le nombre de leurs ogives devait être réduit à une seule par missile.

Ce même procédé fut appliqué à l'AGM-118A, qui comportaient alors dix ogives, à partir de 1992.

Finalement, le SAC ne garda plus que 450 LGM-30G Minuteman III. Ils doivent en principe restés opérationnels jusqu'en 2020. Débarassés de leurs têtes nucléaires, ils servent pour les tests du programme de défense anti-missiles relancé par le Pentagone en 2004.

Les 48 FB-111A encore opérationnels furent transformés en F-111G et affectés à des missions à caractères tactiques au sein du 27th Fighter Wing, basé sur Cannon AFB.

La production du B-2, qui devait être initialement de 132 exemplaires, étalée sur dix ans, avec un budget de développement de 19 milliards de dollars. Mais ce nombre fut ramenée par la suite à 76, puis 20 unités opérationnelles.

L'accroissement extraordinaire des coûts et la fin de la Guerre Froide porta un coup fatal au programme de cet avion: en 1990, le coût du développement était passé de 19 à 77 milliards de dollars.

Les U-2 Dragon Lady et SR-71 Blackbird disparurent en 1991.

Face aux profonds changements qui affectaient le monde, le Strategic Air Command apparaissait désormais comme une sorte d'anachronisme.

Le coup de grâce fut donné le 1er juin 1992, date à laquelle entra en vigueur la nouvelle organisation de l'US Air Force. Quarante-six ans après sa création, le SAC était appelé à disparaître pour être absorbé, avec une grande partie du Tactical Air Command, au sein du nouveau "Air Combat Command" (ACC).

Un petit commandement (USSTRATCOM) de l'aviation stratégique fut cependant conservé, afin de mettre en oeuvre les bombardiers à long rayon d'action en cas d'un éventuel conflit.

Les six Wings de missiles Minuteman III survivants des 14ème et 20ème US Air Force passèrent sous l'autorité du nouveau "Space Command" (SC).

Les avions de reconnaissance RC-135 dépendaient désormais de l'ACC.

La plus grande partie des avions ravitailleurs KC-135 Stratotanker et KC-10A Extender furent réaffectés à l'Air Mobility Command (AMC).

Pendant les presque cinq decennies d'existence de ce grand commandement, les équipages appartenant au Strategic Air Command ont toujours fait preuve d'un constant professionnalisme et se sont appliqués à ne pas faire mentir leur devise: "La paix est notre boulot".

Le fait que, jamais, il n'ont eu à employer leur force dissuasive montre qu'ils sont parvenus à remplir pleinement leur mission.


Modern Marvels - Strategic Air Command - Part 1/6




Modern Marvels - Strategic Air Command - Part 2/6




Modern Marvels - Strategic Air Command - Part 3/6




Modern Marvels - Strategic Air Command - Part 4/6




Modern Marvels - Strategic Air Command - Part 5/6




Modern Marvels - Strategic Air Command - Part 6/6




Liste des bombardiers lourds du SAC (1980-1992):
- Boeing B-52 Stratofortress (1955-1992)
- General Dynamics FB-111A Aardvark (1968-1990)
- Rockwell B-1B Lancer (1986-2008)

Liste des avions de reconnaissance du SAC (1980-1992):
- Lockheed U-2 Dragon Lady (1962-1991)
- Lockheed SR-71 Blackbird (1966-1991)
- Boeing RC-135D Rivet Brass, RC-135E Rivet Amber, RC-135M Rivet Card, RC-135S Rivet Ball, RC-135S Cobra Ball, RC-135U Combat Sent et RC-135V/W Rivet Joint (1963-2007)

Liste des avions ravitailleurs du SAC (1980-1992):
- Boeing KC-135 Stratotanker (1957-2006)
- McDonnell Douglas KC-10A Extender (1981-2008)

Liste des missiles ballistiques intercontinentaux ICBM du SAC (1980-1992):
- LGM-30G Minuteman III (1977-2020)
- LGM-118A Peacekeeper (1986-2005)


Cimetière de B-52 du SAC feraillés dans le désert du Nevada (2006):




Rockwell B-1B Lancer (1986-2008):



Northrop B-2 Spirit (1997-2008):



Lockheed U-2 Dragon Lady (1962-1991):



Lockheed SR-71 Blackbird (1966-1991):



Boeing RC-135U Combat Sent (1963-2008):



Boeing KC-135 Stratotanker (1957-2006):



McDonnell Douglas KC-10A Extender (1981-2008):



LGM-30G Minuteman III (1977-2020):



LGM-118A Peacekeeper (1986-2005):

samedi 27 octobre 2007

Strategic Air Command - Conflit vietnamien et années septantes


Tandis que les missiles ballistiques intercontinentaux (ICBM) prenaient une importance sans cesse accrue, le Strategic Air Command s'engagea activement dans la guerre du Vietnam, où il menait des opérations de bombardement conventionnel à caractère tant stratégique que tactique.

Sur ce théâtre d'opérations, il remplit trois missions fondamentales: le ravitaillement en vol des avions de l'US Air Force, de l'US Marine Corps et de l'US Navy, la reconnaissance, et enfin le bombardement lourd.

En ce qui concerne la première, les nouveaux Boeing KC-135A Stratotanker prirent la relève des vieux KB-50 et KC-97 des PACAF (Pacific Air Forces), et assurèrent bientôt la quasi-totalité des ravitaillements sur l'ensemble du Sud-Est asiatique.

Bien que cela soit moins connu, le SAC effectua également de nombreuses missions de reconnaissance, avec ses Boeing RB-47 et RC-135, et Lockheed U-2 et SR-71.

Mais la principale contribution à l'effort de guerre fut fournie par les B-52Stratofortress stationnés sur Andersen AFB (Guam), dans les îles Mariannes. Par la suite, d'autres B-52 vinrent renforcer ce dispositif à partir de bases en Thaïlande, comme celle d'Utapao.

Les B-52 engagés dans le conflit vietnamien assuraient des missions "Arc Light", à la fois contre des bastions ennemis au Sud-Vietnam, la piste Ho Chi Minh, et contre le complexe militaro-industriel et les aérodromes du Nord-Vietnam.

Une incroyable quantité de bombes, représentant trois fois le tonnage total déversé par les B-17 et B-24 de l'USAAF en Europe pendant toute la durée de la Seconde Guerre mondiale, fut lâchée au cours de cette longue campagne de huit ans que menèrent les B-52, et dont le temps fort fut, en décembre 1972, l'opération "Linebacker II".

Cette puissance de feu dévastatrice contraignit alors les Nord-Vietnamiens à regagner la table des négociations de paix et permit la libération des prisonniers de guerre américains.

Après ce conflit, le reste des années septantes constitua une période de stagnation pour le SAC, surtout lorsque l'administration Carter annonça, en 1977, que le programme du B-1A Lancer, dans lequel les aviateurs américains plaçaient de grands espoirs, fut annulé.

Pendant ce même temps, les unités de missiles stratégiques réceptionnaient les premiers LGM-30G Minuteman III, dont le nombre total d'exemplaires produits atteindra 550. Le LGM-25C Titan II fut également retenu, surtout pour équilibrer la menace représentée par des missiles soviétiques comme le SS-9.


Liste des bombardiers lourds du SAC (1965-1980):
- Boeing B-52 Stratofortress (1955-1992)
- Convair B-58 Hustler (1960-1969)
- General Dynamics FB-111A Aardvark (1968-1990)

Liste des avions de reconnaissance du SAC (1965-1980):
- Lockheed U-2 Dragon Lady (1962-1991)
- Lockheed SR-71 Blackbird (1966-1991)
- Boeing RC-135D Rivet Brass, RC-135E Rivet Amber, RC-135M Rivet Card, RC-135S Rivet Ball, RC-135S Cobra Ball, RC-135U Combat Sent et RC-135V/W Rivet Joint (1963-2008)

Liste des avions ravitailleurs du SAC (1965-1980):
- Boeing KC-135 Stratotanker (1957-2006)

Liste des missiles ballistiques intercontinentaux ICBM du SAC (1965-1980):
- LGM-25C Titan II (1963-1982)
- LGM-30G Minuteman III (1977-2020)


Boeing B-52 Stratofortress (1955-1992):



Convair B-58 Hustler (1960-1969):



Lockheed U-2 Dragon Lady (1962-1991):



Lockheed SR-71 Blackbird (1966-1991):



Boeing RC-135U Combat Sent (1963-2008):



Boeing KC-135 Stratotanker (1957-2006):



LGM-25C Titan II (1963-1982):



LGM-30G Minuteman III (1977-2020)

mardi 23 octobre 2007

Strategic Air Command - Modernisation du SAC


Au début de 1955, le Strategic Air Command avait nettement avancé dans ses efforts de modernisation: il possédait plus de 1000 bombardiers stratégiques B-47 Stratojet, et un nombre comparable de bombardiers tactiques, chasseurs d'escorte et d'avions de reconnaissance.

La capacité de la force de bombardement variait selon les équipements mais, à cette époque, tous les B-29 avaient été retirés du service et seuls quelques B-50 faisaient encore partie des stocks.

Après le B-47 Stratojet, le deuxième bombardier à réaction produit par la firme Boeing, le B-52 Stratofortress, était alors sur le point d'être livré. Ce fut chose faite en juin 1955.

Ce puissant bombardier stratégique, certainement le plus célèbre bombardier américain de la Guerre Froide, propulsé par huit réacteurs, montés dans quatre nacelles, deux par deux, et capable d'emporter de très lourds charges, apparut tout d'abord au sein du 93rd Bomb Wing (BW), stationné sur Castle AFB, en Californie, où il était appelé à remplacer le B-47 Stratojet. En fin de compte, plus de 600 B-52 figurèrent dans l'ordre de bataille du SAC à la fin des années cinquantes.

Véritable bombardier intercontinental, le B-52 Stratofortress n'avait nul besoin d'être mis en oeuvre depuis des bases à l'étranger pour atteindre ses objectifs. Aussi le vit-on rarement hors de l'espace aérien américain, sauf lorsqu'il remporta des records de distance en 1956 et 1962.

Au départ, le déploiement se fit conformément aux principes traditionnels du SAC, chaque Wing de B-52 possédant 45 avions répartis en trois squadrons.

Mais la menace croissante représentée par les missiles ballistiques intercontinentaux (ICBM) soviétiques et le fait qu'inéluctablement, les bases américaines deviendraient vulnérables à une attaque lancée depuis l'Union Soviétique, conduisirent à la mise au point, en 1958, d'un programme de dispersion des B-52.

Au début des années soixantes, chaque base de Stratofortress comptait en règle générale un unique squadron de 15 B-52, auquel était associée une unité d'avions ravitailleurs KC-135 Stratotanker.

Parmi les autres manifestations de la crainte engendrée par le développement des missiles nucléaires soviétiques, à la fin des années cinquantes, figura la mise au point de deux nouvelles méthodes d'alerte entièrement révisées en fonction des nouvelles données stratégiques.

Le concept du "One-Third Alert" était le plus significatif. Sur chaque base du SAC, un tier des bombardiers étaient maintenus en état d'alerte permanent. Ainsi, dans l'hypothèse d'une attaque surprise par missiles, le SAC serait au moins en mesure de mettre en oeuvre le tiers de ses bombardiers pour des actions de représailles.

Bien plus révolutionnaire encore était un programme d'alerte en vol 24 heures sur 24, qui fut testé pour la première fois à la fin de 1958 par les B-52 du 42nd Bomb Wing et qui fait l'objet de nombreux essais en 1959-1960, avant d'être appliqué à deux douzaines de bases au début de 1961.

Il est certain que ce système fut pratiqué tout au long des années soixantes et qu'il fut renforcé rapidement en octobre 1962, lors de la crise des missiles soviétiques à Cuba. Finalement, avec la mise en place des missiles balistiques intercontinaux américains, qui offraient une capacité de riposte presque immédiate, les alertes aériennes se réduisirent, même si aujourd'hui l'alerte au sol constitue encore une part importante de l'activité du SAC.

Alors que la puissance nucléaire américaine reposait toujours entièrement sur les bombardiers stratégiques, les possibilités offertes par les missiles intercontinentaux à longue portée n'avaient en aucune manière été négligées.

Mais ce n'est qu'au mois de septembre 1959 que devint opérationnel le premier ICBM.

Par ailleurs, les premiers modèles de ces engins, l'Atlas, le Snark et le Titan I, réclamaient des soins considérables et constants, et surtout étaient extrêmement vulnérables dans la mesure où ils devaient être lancés depuis le sol. En outre, ils étaient d'une qualité vraissemblablement très moyenne.

Toutefois, l'avènement de l'ère des missiles annonçait le déclin progressif des bombardiers nucléaires pilotés. Des progrès importants furent réalisés par la suite dans le domaine des missiles, avec notamment la mise au point du Titan II et du Minuteman I, beaucoup plus fiables que leurs prédécesseurs et pouvant être placés dans des silos qui les rendaient infiniment moins vulnérables.

Dans le même temps, la précision de ces armes était bien supérieure.

Le rythme de développement des ICBM américains fut si rapide que, en l'espace de quatre ans et demi, le nombre de missiles en alerte dépassa celui des bombardiers pilotés.

Parrallèlement, même lorsque l'ère du missile devint une réalité, le SAC continua de recevoir de nouveaux bombardiers. A cet égard, le plus remarquable fut le Convair B-58 Hustler, qui entra en service en août 1960 au sein du 43rd Bomb Wing. Par la suite, cet avion ne fut produit qu'en petite quantité, mais ses remarquables performances furent reconnues grâce à plusieurs records établis au début des années soixantes.

Le 26 octobre 1962, les derniers exemplaires du B-52 et du B-58 furent officiellement livrés au Strategic Air Command et, pour la première fois depuis 1946, aucun modèle de bombardier ne fut conçu ni mis en commande pour les remplacer.

Par la suite, à partir de 1968, un dérivé du très controversé General Dynamics F-111 Aardvark, le FB-111A, fut produit pour le SAC, mais en nombre très restreint.

Ce n'est qu'au milieu des années quatre-vingt qu'un nouveau modèle de bombardier, le B-1B Lancer, a été commandé et mis en production, en quantité restreinte, et encore failli-t-il ne jamais voir le jour, en raison de manoeuvres politiciennes.

Le B-2 Spirit, ne fut conçu et commandé après la disparition du Strategic Air Command.


Liste des bombardiers lourds du SAC (1955-1965):
- Boeing B-47 Stratojet (1951-1965)
- Boeing B-52 Stratofortress (1955-1992)
- Convair B-58 Hustler (1960-1969)
- General Dynamics FB-111A Aardvark (1968-1990)

Liste des avions de reconnaissance du SAC (1955-1965):
- Lockheed U-2 Dragon Lady (1962-1991)

Liste des avions ravitailleurs du SAC (1955-1965):
- Boeing KC-135 Stratotanker (1957-2006)

Liste des missiles balistiques intercontinentaux ICBM (1955-1965):
- SM-65 [CGM-16] Atlas I (1955-1968)
- SM-68A [HGM-25B] Titan I (1960-1965)
- SM-68B [LGM-25C] Titan II (1963-1982)
- SM-80 [LGM-30A/B] Minuteman I (1960-1997)


Boeing B-52 Stratofortress (1955-1992):



Convair B-58 Hustler (1960-1969):



General Dynamics FB-111A Aardvark (1968-1990):



Boeing B-52H (1955-1992) et KC-135 Stratotanker (1957-2006):



SM-68B [LGM-25C] Titan II (1963-1982):




SM-80 [LGM-30A/B] Minuteman I (1960-1997):

dimanche 14 octobre 2007

Strategic Air Command - Formidable expansion du SAC


La mise en activité, en juin 1948, des deux premiers squadrons de ravitaillement en vol ne fut pas moins significative. Ils étaient équipés à l'origine de KB-29M, avions utilisant un système anglais de tuyaux et de grappins.

Une démonstration des capacités de cet équipement fut fournie au mois de décembre 1948, lorsqu'un B-50 du 43rd Bomb Group effectua un vol aller et retour sans escale entre le Texas et les îles Hawaii (15880km). Au cours de cette mission, qui dura quarante-et-une heures, trois ravitaillements en vol à l'aide de KB-29M avaient été réalisés.

Mais cette performances fut totalement éclipsée en mars 1949 par un autre record, plus extraordinaire encore: le B-50 "Lucky Lady II", après plusieurs ravitaillements en vol, accomplit le premier tour du monde sans escale.

L'efficacité sans égale du ravitaillement en vol apparut plus clairement encore, puisqu'elle avait rendu possible un parcours de 37740km. Le KB-29M fut bientôt remplacé par le KB-29P, qui tirait son originalité de l'emploi du "Flying Boom", un nouveau système, aujourd'hui généralisé, conçu par la firme Boeing et qui devait équiper par la suite tous ses avions ravitailleurs KC-97 et KC-135.

Appuyée sur des bases solides, l'expansion du Strategic Air Command se poursuivit en 1949-1950, période qui marqua la première participation du SAC à des missions de guerre au-dessus de la Corée du Nord, à partir de juillet 1950.

Employé uniquement pour des bombardements conventionnels, le B-29 fut le seul bombardier stratégique américain à intervenir au cours de ce conflit: plus de 150000 tonnes de bombes furent larguées au cours des trois années de guerre.

C'est pendant ces opérations que le général Douglas MacArthur sollicita l'autorisation de recourir à l'arme nucléaire, non seulement contre la Corée du Nord, mais également contre la Chine. Le prestigieux vainqueur des Japonais dans la guerre du Pacifique espérait ainsi endiguer le flot ininterrompu de fournitures qui parvenait aux forces communistes depuis la frontière chinoise.

Cette requête extrême fut rejetée par le président Harry S. Truman, qui devait par la suite, pour diverses autres raisons, limoger McArthur de son commandement des forces des Nations Unies en Corée.

Récemment, grâce à des archives déclassifiées, on apprit également que le successeur de Truman, Dwight D. Eisenhower, envisagea lui aussi l'utilisation de l'arme nucléaire contre la Chine, dans l'éventualité d'une rupture définitive des négociations de paix.

Bien que le nombre d'unités du SAC impliquées ait été limité, la guerre de Corée eut des conséquences importantes pour l'organisation, notamment sur le plan des équipements. Certes, le développement de nouveaux modèles de bombardiers à réaction avait été mis à l'ordre du jour dès la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Au moment où éclate le conflit coréen, le Boeing B-47 Stratojet était sur le point d'entrer en service et plus d'un millier d'exemplaires étaient en commande. Mais son rythme de construction resta assez timide, et les plans initiaux de modernisation envisageaient, semble-t-il, la constitution lente et mesurée, sur des bases solides, d'une puissante flotte de bombardiers à réaction.

La guerre de Corée bouleversa tous ces plans: le B-47 devint l'objet d'un programme de fabrication accéléré, et le SAC reçut, en l'espace de cinq ans, plus de 1500 Stratojet.

Au début de 1957, époque où le B-47 était le plus largement utilisé, trente-trois squadrons étaient en service sur ce type d'avion, vingt-huit destinés à des missions de bombardement conventionnels, et cinq à des missions de reconnaissance stratégique (RB-47).

Les livraisons avaient débuté à un rythme normal en octobre 1951, le 306th Bomb Wing de MacDill AFB (Floride) recevant à cette date ses premiers B-47B.

A la fin de 1952, le nombre de Stratojet en service étaient encore modeste. C'est à partir de 1953, lorsque d'autres constructeurs commencèrent à produire le B-47 en grande quantité, que la modernisation des unités opérationnelles s'accéléra fortement.

Dès la fin de 1953, le nombre de B-47 mis en oeuvre était de 428. En décembre de l'année suivante, il était de 1060.

A cette époque, le Stratojet était utilisé tant sur le territoire national qu'à l'étranger, avec des rotations d'entraînement de nonante jours, en recourant à partir de 1953 aux bases de l'USAF en Angleterre, en Espagne, au Maroc et aux îles Mariannes.

Parallèlement, plusieurs centaines de ravitailleurs Boeing KC-97 Stratotanker étaient livrés au Strategic Air Command.

La mise en service du B-47 ainsi que la présence dans le même temps de ravitailleurs valables, qui étaient disponibles en permanence, permirent également au SAC de développer une nouvelle conception de bombardiers lourds intercontinentaux.

La première expérience de ce type, qui eut lieu au cours de l'été 1954, fut l'oeuvre de deux Bomb Groups de B-47 appartenant à la 38th Air Division, stationnée sur Hunter AFB (Géorgie). Baptisé du nom de code Leap Frog ("Saute-moutons"), l'exercice consistait dans le lancement depuis Hunter AFB d'une mission de bombardement simulée, conduite simultanément par deux groupes et s'achevant par l'atterrissage de ceux-ci sur une des bases américaines du Maroc français, Siddi Slimane AFB.

Avant cet essai, les plans de guerre du SAC envisageaient le déploiement des avions sur des bases éloignées, d'où ils seraient en mesure de lancer des attaques. Mais un tel système présentait de graves inconvénients: en particulier, nul n'était certain que les bases considérées seraient défendables dans l'hypothèse d'un conflit nucléaire généralisé. Grâce aux ravitailleurs, cette conception put être révisée. L'effet de "disuasion nucléaire" s'en trouva renforcé, dans la mesure où le délai de riposte était sensiblement réduit.


Liste des bombardiers lourds du SAC (1950-1955):
- Boeing B-29 Superfortress (1946-1953)
- Boeing B-50 Superfortress (1948-1954)
- Convair B-36 Peacemaker (1948-1958)
- Boeing B-47 Stratojet (1951-1965)

Liste des chasseurs d'escorte du SAC (1950-1955):
- Republic F-84 Thunderjet (1948-1957)
- North American F-86 Sabre (1949-1953)

Liste des avions de reconnaissance du SAC (1950-1955):
- Boeing RB-17G (B-17G) Flying Fortress (1946-1951)
- Boeing F-9 [F=Photorecon] (B-17F/G) Flying Fortress (1946-1948)
- Boeing F-13 et RB-29A (B-29A) Superfortress (1946-1951)
- North American F-6 (P-51D) Mustang (1946-1949)

Liste des avions de support du SAC (1950-1955):
- Douglas B-26 (A-26) Invader (1949-1950)
- Douglas C-47 Skytrain (1946-1947)
- Douglas C-54 Skymaster (1946-1975)

Liste des avions ravitailleurs du SAC (1950-1955):
- Boeing KB-29M et KB-29P (1948-1953)
- Boeing KC-97 Stratotanker (1950-1956)


Boeing B-47E Stratojet (1951-1965), restauré, en 1986:



Deux Boeing KB-29M Refuelling (1948-1953):



Boeing KC-97L Stratotanker (1950-1956):

samedi 13 octobre 2007

Strategic Air Command - Naissance du SAC


Au cours de l'immédiat après-guerre, la plus grande partie des nations alliées réduirent leurs forces militaires.

Les Etats-Unis, en raison de la détérioration des relations avec l'Union Soviétique, furent les premiers à revenir aux dures réalités. Les crédits du budget militaire furent largement réouverts. C'est ainsi qu'en mars 1946, le Strategic Air Command (SAC) vit le jour.

L'entente qu'étaient parvenues à réaliser, non sans mal, les trois grandes puissances alliées de la Seconde Guerre mondiale, les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et l'Union Soviétique, se désagrégea rapidement après la capitulation nazie. La suspicion laissa la place à une hostilité à peine voilée. Ce climat dégénéra peu à peu, aboutissant à des conflits déclarés entre des pays qui avaient choisi des voies différentes.

La guerre de Corée et la guerre d'Indochine furent la manifestation la plus évidente de cette grande confrontation idéologique des années cinquantes, mais la Guerre Froide se situa en fait à plusieurs niveaux parfois difficilement perceptibles. Un des aspects les plus significatifs de cet affrontement, et aussi un des plus visibles, fut la croissance incroyablement rapide du Strategic Air Command, un commandement qui n'existait pas à la fin de la Seconde Guerre mondiale, et sur lequel allait pourtant reposer pendant plus de dix ans la capacité nucléaire américaine.

Créé le 21 mars 1946 pour constituer un des trois principaux commandements de l'US Army Air Force (USAAF), le SAC hérita d'abord d'un parc quelque peu hétéroclite, et dans une large mesure dépassé, comprenant des bombardiers, des chasseurs d'escorte et des avions de reconnaissance.

Le plus important de ces avions des premières années d'existance du SAC fut sans conteste le B-29 Superfortress, vétéran éprouvé de la Guerre contre le Japon en Asie du Sud-Est et dans le Pacifique.

Les premiers mois d'existence du SAC furent surtout une période d'adaptation et de consolidation. De fait, à la fin 1946, cette organisation avait sensiblement diminué en taille, essentiellement en raison de la démobilisation prise dans l'immédiat après-guerre. Au point qu'elle ne contrôlait plus que neuf groupes de bombardiers, dont six de B-29. Néammoins, les armements et les concepts opérationnels du futur étaient déjà en cours d'examen et d'élaboration, ainsi qu'en témoignent les essais atomiques de l'atoll de Bikini, en juillet 1946, et le déploiement des B-29 du 28th Bomb Group, en octobre de la même année, de Grand Island Army Air Field (Nebraska) jusqu'à Elmendorf AAF (Alaska). Ce déploiement illustre un aspect particulièrement important des opérations conduites par le SAC jusqu'au milieu des années soixantes.

Doté désormais de base durables, le Strategic Air Command entreprit de s'étendre et d'accroître ses moyens au cours de l'année 1947. C'est ainsi que le nombre de ses bombardiers fit plus que doubler en l'espace d'une année, même s'il est douteux que la capacité offensive globale se soit accrue dans des proportions considérables.

En effet, le B-29 restait l'élément de base de l'aviation de bombardement stratégique, ce qui apparut pleinement en mai 1947, lorsque la première mission opérationnelle à longue distance fut organisée. Ce fut pour l'essentiel un exercice d'entraînement qui culmina avec une attaque simulée de New York. Les responsables constatèrent à cette occasion que, sur les 131 B-29 participant à l'exercice, 30 ne purent décoller. Cependant, de nombreux équipements étaient prévus, et l'année qui suivit se révéla décisive.

1948 vit naître deux nouveaux modèles de bombardiers lourds, et vit apparaître les systèmes de ravitaillement en vol. Mais l'action la plus lourde de conséquence fut la désignation d'un nouveau commandant énergique: le général Curtis E. LeMay, l'ancien chef de la 20ème US Air Force qui avait bombardé quotidiennement le Japon à partir des îles Mariannes.

Nommé pour dix ans, LeMay succéda le 19 octobre 1948 au général George C. Kenney. Très vite, il sut s'imposer à tous les niveaux du SAC, prenant des mesures originales et spectaculaires, telle la promotion rapide accordée aux équipages les plus méritants, augmentant le rythme des rotations d'entraînement et l'étendant même à certaines bases à l'étranger.

L'"Ere LeMay" commençait, et elle représentera le sommet de l'histoire du Strategic Air Command, dans la contexte où les réalisations correspondaient à ses ambitions. Il est juste de dire que le SAC s'est littéralement transformé sous la direction dynamique de LeMay.

L'organisation aurait-elle atteint tous ses objectifs dans un contexte de paix internationale? La réponse relève du domaine de la conjoncture. Il reste que LeMay a largement bénéficié de l'impulsion fournie par la guerre de Corée, qui éclata moins de deux ans après son arrivée.

Assurément, la Guerre Froide se "réchauffa" à cette époque de manière très sensibles, et ses effets se firent sentir dans de nombreux domaines. En particulier, le SAC bénéficia de crédits pour ainsi dire illimités, qui lui permirent l'acquisition de centaines de nouveaux bombardiers à réaction, plus modernes et plus performants que les vieux B-29. Ce concours de circonstances ne diminua en rien les mérites et l'action de LeMay, qui resta capitale.

A la fin de juin 1948, peu de temps avant l'arrivée de celui-ci, la capacité globale du SAC avait commencé à s'accroître dans des proportions considérables, notamment avec la livraison de bombardiers à réaction, des Convair B-36 Peacemaker, dont les premiers exemplaires rejoignirent le 7th Bomb Group stationné sur Carswell Air Force Base (Texas).

Quelques mois plus tôt, le B-50, version modifiée et modernisée du B-29 d'origine, était lui aussi entré en service, au sein du 43rd Bomb Group, à Davis-Montham AFB (Arizona). Toutefois, ces deux nouveaux modèles n'étaient encore disponibles qu'en petit nombre lors de la nomination de LeMay. En outre, si le B-50 s'adapta sans trop de difficultés aux conditions opérationnelles, il fallut presque trois ans pour que le B-36 deviennent pleinement opérationnel.


Liste des bombardiers lourds du SAC (1946-1950):
- Boeing B-29 Superfortress (1946-1953)
- Boeing B-50 Superfortress (1948-1954)
- Convair B-36 Peacemaker (1948-1958)

Liste des chasseurs d'escorte du SAC (1946-1950):
- Republic P-47 (F-47) Thunderbolt (1946-1947)
- North American P-51 (F-51) Mustang (1946-1949)
- North American F-82 Twin Mustang (1947-1950)
- Lockheed P-80 (F-80) Shooting Star (1946-1948)

Liste des avions de reconnaissance du SAC (1946-1950):
- Boeing RB-17G (B-17G) Flying Fortress (1946-1951)
- Boeing F-9 [F=Photorecon] (B-17F/G) Flying Fortress (1946-1948)
- Boeing F-13 et RB-29A (B-29A) Superfortress (1946-1951)
- North American F-6 (P-51D) Mustang (1946-1949)

Liste des avions de support du SAC (1946-1950):
- Douglas B-26 (A-26) Invader (1949-1950)
- Douglas C-47 Skytrain (1946-1947)
- Douglas C-54 Skymaster (1946-1975)


Boeing B-50D Superfortress avec moteurs R-4360 (1948-1954):



Boeing B-29 (1946-1953) et Convair B-36 "Peacemaker" (1948-1958):